Qui est l’autorité de contrôle LAB des Experts-comptables et Conseillers fiscaux ?

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  1. Voici un dossier dans lequel, de notre regard, l’ITAA aurait mieux fait de se taire et de ne pas dépenser l’argent des membres pour défendre une position de demande de suspension apparemment indéfendable. La Cour constitutionnelle a rendu son arrêt 2024-26 dans le dossier de demande suspension de la loi du 5 novembre 2023.
  2. Ceci d’autant que, selon le conseil des ministres, l’ITAA aurait participé à la rédaction de la modification de la réglementation visée et aurait acquiescé le projet.
  3. L’ITAA soutient que l’article 119, 2°, de la loi du 5 novembre 2023 contenant des dispositions diverses en matière d’économie, qui modifie l’article 116, alinéa 2, de la loi du 17 mars 2019, a pour effet que son règlement de procédure existant sur l’organisation d’un système de revue qualité, prévisible et cohérent, n’est plus valable et qu’il ne pourrait plus exécuter sa mission légale.
  4. L’ITAA est, en terme de LAB, une autorité de contrôle au sens de l’article 85, par. 1er, de la loi du 18 septembre 2017 relative à la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et à la limitation de l’utilisation des espèces (usuellement dénommée LAB). C’est sur cette base que l’ITAA réalise auprès de ses membres dans le cadre de la revue qualité, terme très pudique ou hypocrite, cette mission d’autorité de contrôle LAB.
  5. L’ITAA dénonce le fait que la compétence d’établir les règles de procédure pour cette revue qualité LAB est accordée au Roi, alors que tel n’est pas le cas pour d’autres autorités professionnelles qui peuvent déterminer elles-mêmes leurs règles de procédure. Selon elle, cette différence de traitement n’est pas raisonnablement justifiée.
  6. Ce n’est exact que pour les notaires, les huissiers et les avocats mais pas pour les agents immobiliers, les géomètres experts ou les réviseurs d’entreprise. Le législateur possède donc le droit de choisir librement la manière dont la qualité des missions réalisées par les membres d’un groupement professionnel de droit public est contrôlée. Aucune discrimination apparente n’existe. Les notaires, huissiers et les avocats réalisent notamment des missions issues du Code judiciaire, ce qui n’est pas le cas des experts-comptables ou conseillers fiscaux.
  7. D’ailleurs, jusqu’à ce jour, l’ITAA possède ce droit de contrôle de la revue qualité LAB sur ses membres. La loi du 5 novembre 2023 accorde au Roi le droit de modifier ce pouvoir de contrôle et de l’accorder aux agents du SPF Economie. Cependant, aucun arrêté royal sur ce transfert de compétence n’est intervenu à ce jour de sorte qu’en absence d’AR, la réglementation en vigueur reste simplement d’application.
  8. L’ITAA a cru bon « préventivement » d’introduire une action en suspension de l’article 119, 2°, de la loi du 5 novembre 2023 en estimant qu’il existe un risque de préjudice grave difficilement réparable, quod non ?
  9. Comment estimer l’existence d’un risque alors que l’effet de la potentielle modification du pouvoir de contrôle n’est pas intervenu à défaut d’un arrête royal ?
  10. Ce sera le jour où l’arrêté royal sera promulgué que le transfert potentiel du pouvoir de contrôle interviendra et que l’ITAA devra respecter le choix émis par le législateur.
  11. En dehors de cette apparente discrimination, selon l’ITAA, qui pourra être développée lors des débats au fonds (si l’affaire n’est pas radiée avant), la Cour constitutionnelle n’a pas accédé à la demande de l’ITAA de suspendre cette partie de la loi eu égard à l’absence de respect de la condition de fonds qu’il existe, aujourd’hui, un risque de préjudice grave difficilement réparable.
  12. En effet, en dehors de l’intérêt requis pour introduire la demande, deux conditions de doivent être réunies pour obtenir du juge qu’il examine une demande de suspension d’une disposition législative : des moyens sérieux doivent être invoqués et l’exécution immédiate de la règle attaquée doit risquer de causer un préjudice grave au demandeur.
  13. Malgré le fait que le conseil des ministres ait contesté à l’ITAA l’intérêt requis pour introduire la demande, la Cour n’a pas retenu, comme s’est régulièrement son habitude, les arguments présentés et l’intérêt de l’ITAA a été validé.
  14. Par contre, sans s’attarder sur la conditions des moyens sérieux, la Cour a attentivement examiné le risque actuel de causer un préjudice grave à l’ITAA et elle a conclu qu’en l’absence d’AR ce préjudice était inexistant.
  15. En effet, l’article 116, alinéa 2, de la loi du 17 mars 2019 confie au Roi la mission de fixer les modalités relatives aux mesures et sanctions administratives visées à l’article 116, alinéa 1er mais, jusqu’au jour où le Roi accomplit cette mission, la manière dont l’ITAA exerce sa mission légale n’est pas modifiée par rapport à la situation qui existait avant l’entrée en vigueur de l’article 119 de la loi du 5 novembre 2023.
  16. L’ITAA a donc logiquement été débouté de sa demande suspension qui a été rejetée.
  17. A ce jour, l’ITAA reste l’autorité de contrôle des membres en matière de revue qualité LAB.

 

Jean Pierre RIQUET

Président de l’Académie fiscale ASBL

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