Déduction anticipée des pertes Covid à l’impôt des sociétés

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I.  INTRODUCTION

Dès l’apparition de la pandémie de la « COVID-19 », les autorités fédérales et régionales n’ont pas tardé à prendre des mesures d’aide aux entreprises[1][2].

Dans le but de lutter contre les conséquences économiques des différentes mesures de confinement et en l’occurrence en vue de renforcer la solvabilité et les fonds propres des sociétés, il a été décidé de permettre aux entreprises d’exonérer anticipativement[3] leurs pertes potentielles futures.

Même si cette exonération est temporaire, cette mesure permet de sauvegarder la solvabilité et les liquidités des entreprises, En effet, par ce procédé, elles peuvent déduire plus rapidement leurs pertes futures et ainsi, soit alléger voire supprimer leur charge d’impôt soit récupérer les précomptes éventuels ainsi que les versements anticipés effectués pendant la période imposable.

II. GENERALITES

Dans ce contexte, le Code des Impôts sur les revenus (CIR en abrégé) a donc été modifié pour introduire cette exonération temporaire[4] mais également, selon le cas, pour prévoir d’une part, une majoration de la base imposable sous la forme d’une dépense non admise[5] (DNA en abrégé) et d’autre part, une sanction sous la forme d’une cotisation distincte[6].

La réserve temporairement exonérée doit être déduite des bénéfices réservés imposables à la fin de la période imposable se rattachant soit à l’exercice d’imposition 2019 soit à l’exercice d’imposition 2020.

En ce qui concerne le calcul d’une DNA, le but poursuivi par le législateur consiste à neutraliser l’avantage éventuel provenant d’une diminution du taux de l’impôt des sociétés (ISoc en abrégé) entre l’exercice d’imposition de l’exonération et celui de la réintégration de la perte antérieurement exonérée.

Quant à la cotisation distincte, dans la mesure où l’estimation de la perte future doit être aussi proche que possible de la perte réellement supportée, elle constitue une sanction qui est appliquée lorsque la réserve exonérée est supérieure à la perte réelle (avec une tolérance de 10%- voir infra).

III EXERCICE D’IMPOSITION DE L’EXONÉRATION DE LA RÉSERVE

1 Généralités

Pour rappel, la réserve temporairement exonérée doit être déduite des bénéfices réservés imposables à la fin de la période imposable se rattachant soit à l’exercice d’imposition 2019 soit à l’exercice d’imposition 2020.

Concrètement, la réserve exonérée est constituée de l’estimation de la perte fiscale[7] de l’exercice comptable suivant.

L’exercice comptable doit avoir été clôturé au cours de la période allant du 13/03/2019 au 31/07/2020[8], ce qui implique que seules les sociétés dont le bilan est clôturé à une autre date que le 31/12 ont le choix de postuler l’exonération soit pour l’exercice d’imposition 2019 soit pour l’exercice d’imposition 2020.

Techniquement il s’agit d’une déduction extra-comptable à opérer uniquement au niveau de la déclaration à l’ISoc. Cette exonération ne doit donc pas être comptabilisée à un ou plusieurs comptes distincts du passif et n’est donc pas soumise au respect de la condition d’intangibilité[9].

La réduction est opérée, au choix du contribuable, par une diminution des bénéfices réservés imposables à la fin de la période[10], y compris sur la réserve légale mais à l’exclusion des réserves occultes et de la quotité imposables des plus-values de réévaluation. A défaut de réserves imposables suffisantes, la rubrique bénéfice (perte) reporté(e) est adaptée à juste concurrence.

L’exonération de la perte fiscale future ne peut être postulée que pour une seule période imposable[11].

Toutefois, le montant de l’exonération doit être limité[12] et ne peut pas être supérieur au montant du résultat imposable[13] avant déduction de la réserve exonérée diminué des revenus définitivement taxés, des revenus mobiliers exonérés[14], des revenus d’innovation[15] et des revenus de brevets[16] déductibles et perçus au cours de la période imposable. Le montant ainsi limité ne peut dépasser un maximum absolu de 20 millions d’euros.

2 Sociétés exclues

Le texte légal prévoit expressément toute une série de cas d’exclusion de cette mesure[17].

En substance, sont exclues :

  • les sociétés qui ont effectué durant la période du 12/03/2020 jusqu’au jour du dépôt de la déclaration à l’ISoc de l’exercice d’imposition 2021 :
  • Un rachat d’actions ou de parts propres,
  • Une attribution ou une distribution de dividendes visés à l’article 18 CIR, en ce compris les distributions de réserves de liquidation visées aux articles 184quater et 541 CIR,
  • Une diminution de capital, en ce compris le capital visé à l’art 537 CIR ou tout autre diminution ou distribution de capitaux propres ;
  • les sociétés qui bénéficient d’un régime fiscal particulier (sociétés d’investissement, sociétés coopératives en participation, …) ;
  • les sociétés qui pouvaient être considérées comme entreprises en difficulté au 18/03/2020
  • les sociétés liées à des paradis fiscaux.

3 Formalités

Le cas échéant, le contribuable est tenu de compléter et de joindre à sa déclaration à l’ISoc un relevé 275COV[18].

Ce formulaire permet au contribuable d’indiquer :

  • le calcul de la limite et le montant de la réserve exonérée ;
  • le détail des rubriques des bénéfices réservés imposables diminuées par la constitution de cette réserve.

4 Adaptation de la déclaration à l’ISoc

Le cadre des bénéfices réservés exonérés a été modifié pour y faire apparaître le montant de la réserve exonérée.

N.B. : cette rubrique ne figurant pas dans la déclaration de l’exercice d’imposition 2019, la société devait mentionner le montant de la réserve exonérée au niveau de la rubrique « autres éléments exonérés »[19].

5 Calcul de l’estimation de l’impôt

Pour l’exercice au cours duquel la réserve exonérée est constituée, l’estimation de l’impôt ne doit pas être influencée par l’économie d’impôt réalisée.

Le calcul doit donc être effectué sans tenir compte de cette réserve temporairement exonérée[20].

IV Exercice d’imposition de la réintégration de la réserve

1 Généralités

Selon que l’exonération de la réserve est intervenue pour l’exercice d’imposition 2019 ou 2020, la réintégration doit être effectuée dans les bénéfices réservés imposables à la fin de la période imposable[21] soit pour l’exercice d’imposition 2020 soit pour l’exercice d’imposition 2021.

2 Formalités

Pour l’exercice de la réintégration de la réserve, le contribuable est tenu de compléter et de joindre à sa déclaration à l’ISoc un relevé 275COV[22].

Ce formulaire permet au contribuable d’indiquer :

  • le calcul du résultat de la période imposable « corrigé » ;
  • le montant de la réserve antérieurement exonérée ;
  • le montant de la dépenses non admise éventuelle (voir infra) ;
  • le montant de la perte fiscale avant réintégration de la réserve exonérée utile au niveau du calcul de la cotisation distincte éventuelle (voir infra).

3 Majoration de la base imposable

L’article 185, par. 5 CIR introduit une nouvelle dépense non admise reprise au niveau du code 1266 de la déclaration à l’ISoc à partir de l’exercice d’imposition 2020.

Cette majoration de la base imposable a pour but de neutraliser l’éventuelle économie d’impôt réalisée par la société ayant fait usage de la déduction anticipée de ses pertes « COVID ».

En effet, dans certains cas, le taux de l’ISoc est plus élévé pour l’exercice d’imposition de la constitution de la réserve que le taux applicable à l’exercice d’imposition de la réintégration.

Cette différence de taux peut résulter :

  • d’une baisse puis d’une suppression de la contribution complémentaire de crise[23];
  • d’une baisse progressive du taux de l’ISoc[24];
  • d’une modification du régime du taux réduit[25] dont peuvent bénéficier les petites sociétés[26];
  • du fait qu’une société peut être considérée comme petite pour l’exercice de la réintégration alors qu’elle était exclue du régime du taux réduit pour l’exercice de la constitution de la réserve exonérée.

Lorsque la société est exclue du taux réduit pour les deux exercices d’imposition concernés, le montant de la DNA est obtenu en multipliant le montant de la réserve exonérée par :

  • 14,91 % dans le cas où la période imposable au cours de laquelle la réserve exonérée visée à l’article 194septies/1, § 1er, a été constituée a débuté avant le 1er janvier 2018 (taux de 33,99%) et la période imposable au cours de laquelle la réserve est reprise a débuté à partir du 1er janvier 2018 (taux de 29,58%) ;
  • 0 % dans le cas où la période imposable au cours de laquelle la réserve exonérée visée à l’article 194septies/1, § 1er, a été constituée a débuté à partir du 1er janvier 2018 (taux de 29,58%) et la période imposable au cours de laquelle la réserve est reprise a débuté avant le 1er janvier 2020 (taux de 29,58%) ;
  • 18,32 % dans le cas où la période imposable au cours de laquelle la réserve exonérée visée à l’article 194septies/1, § 1er, a été constituée a débuté avant le 1er janvier 2020 (taux de 29,58%) et la période imposable au cours de laquelle la réserve est reprise a débuté à partir du 1er janvier 2020 (taux de 25%)​​.[27].

Par contre, si la société n’est pas exclue du taux réduit pour les deux exercices d’imposition concernés, le taux à appliquer est égal à la différence entre le pourcentage qui est obtenu après l’application du rapport (voir formule ci-dessous) et 100%[28].

Ce rapport est déterminé comme suit[29] :

A – B

——-     x 100 – 100%

E – F

A =      Taux de l’ISoc de l’exercice de l’exonération x (base imposable de l’exercice de l’exonération + réserve exonérée)

B =      Taux de l’ISoc de l’exercice de l’exonération x base imposable de l’exercice de l’exonération

E =      Taux de l’ISoc de l’exercice de la réintégration x base imposable de l’exercice de la réintégration (MINIMUM le montant de la réserve exonérée[30])

F =      Taux de l’ISoc de l’exercice de la réintégration x (base imposable de l’exercice de la réintégration (MINIMUM le montant de la réserve exonérée) – réserve exonérée)

Le taux obtenu est arrondi à la deuxième décimale supérieure ou inférieure selon que le chiffre de la troisième décimale atteint ou non 5[31].

4 Cotisation distincte[32]

L’objectif de cette mesure consistant à faire correspondre au mieux l’estimation de la perte fiscale temporairement exonérée au montant de la perte fiscale réellement supportée, avec une tolérance de 10%, l’article 219ter impose au contribuable de calculer et de déclarer lui-même le montant de la base de la cotisation ainsi que le taux à appliquer à ladite base.

a Base de la cotisation distincte[33]

La base de la cotisation distincte est obtenue en appliquant la formule suivante :

Taux de l’ISoc x (bénéfice – 10% de la perte)

Taux de l’ISoc =        taux de l’exercice de la réintégration visé à l’article 215, alinéa 1er CIR (taux plein)

Bénéfice =                 Résultat fiscal[34] (y compris la réserve exonérée) diminué des montants déductibles à titre de RDT et RME, de revenus de brevets et de revenus d’innovation de la période imposable.     

Le montant du bénéfice ainsi obtenu doit être limité au maximum au montant de la réserve exonérée[35].

Perte =                       montant de la réserve exonérée + DNA (code 1266) – bénéfice (non limité)

                                    Le montant de la perte ainsi obtenu ne peut pas être inférieur à zéro[36].

b Taux de la cotisation distincte

Le taux de la cotisation distincte ne peut pas être inférieur à 2% ni supérieur à 40%[37] et est obtenu en appliquant la formule suivante :

     BENEFICE

———————- x 100 x 20%

A + B – BENEFICE

Bénéfice =                 Résultat fiscal[38] (y compris la réserve exonérée) diminué des montants déductibles à titre de RDT et RME, de revenus de brevets et de revenus d’innovation de la période imposable.

A =                              Montant de la réserve exonérée

B =                              Montant de la DNA (code 1266)

 Le taux obtenu est arrondi à la deuxième décimale supérieure ou inférieure selon que le chiffre de la troisième décimale atteint ou non 5[39].

Si le « bénéfice » est égal ou supérieur à « A+B », le taux de la cotisation distincte est égal à 40%[40].

Dans la mesure où cette cotisation distincte fait partie intégrante de l’impôt des sociétés, son montant constitue donc une dépense non admise[41].

V Entrée en vigueur

  • Pour la période imposable de l’exonération :

SOIT l’exercice d’imposition 2019 si l’exercice comptable est clôturé entre le 13/03/2019 et le 30/12/2019 ;

SOIT l’exercice d’imposition 2020 si l’exercice comptable est clôturé entre le 31/12/2019 et le 31/07/2020

  • Pour la reprise de l’exonération : soit l’exercice d’imposition 2020 soit l’exercice d’imposition 2021 selon que la société a exonéré la réserve pour l’exercice d’imposition 2019 ou 2020

VI Loi anti-abus

Toute modification apportée à la date de clôture de l’exercice comptable à partir du 15/05/2020 reste sans effet pour l’application de cette mesure d’exonération[42].

VII Illustration

Prenons l’exemple d’une société résidente dont l’exercice comptable correspond à l’année civile et qui, pour les exercices d’imposition 2020 et 2021, peut bénéficier du taux réduit à l’ISoc en vertu des dispositions de l’article 215, alinéa 2 CIR.

Compte tenu des difficultés rencontrées dans le contexte de la pandémie « COVID-19 », elle estime sa perte fiscale de l’année civile 2020 à 170.000,00 EUR.

Pour l’exercice d’imposition 2020 (bilan au 31/12/2019), elle devrait déclarer une augmentation des bénéfices réservés imposables de 100.000,00 EUR et un total de dépenses non admises de 80.000,00 EUR, soit un résultat « 1ère opération » positif de 180.000,00 EUR.

Après imputation anticipée de la perte estimée de l’exercice suivant, elle déclare donc un résultat « 1ère opération » positif de 10.000,00 EUR.

Pour l’exercice comptable 2020, la perte comptable s’élève à 240.000,00 EUR et le montant des dépenses non admises s’élève à 85.000,00 EUR, soit une perte fiscale réelle de 155.000,00 EUR.

Après réintégration de la perte estimée déduite pour l’exercice précédent, elle déclare donc un résultat « 1ère opération » positif de 15.000,00 EUR (-155.000,00 + 170.000,00), sans tenir compte du montant de la DNA éventuelle (code 1266).

Déclaration à l’ISoc de l’exercice d’imposition 2020 (bilan au 31/12/2019) :

Bénéfices réservés imposables 01/01/2019 31/12/2019 AVANT imputation 31/12/2019 APRES imputation
Réserve légale 10 000,00 10 000,00 10 000,00
Bénéfice reporté 230 000,00 330 000,00 160 000,00
Réserve de liquidation 150 000,00 150 000,00 150 000,00
  390 000,00 490 000,00 320 000,00
Diminution des réserves   -70 000,00
Dépenses non admises 80 000,00
Résultat 1ère opération (code 1410 de la déclaration ISoc) 10 000,00

 

Déclaration à l’ISoc de l’exercice d’imposition 2021 (bilan au 31/12/2020) :

Bénéfices réservés imposables 01/01/2020 31/12/2020 AVANT reprise 31/12/2020 APRES reprise
Réserve légale 10 000,00 10 000,00 10 000,00
Bénéfice reporté 160 000,00 -80 000,00 90 000,00
Réserve de liquidation 150 000,00 150 000,00 150 000,00
  320 000,00 80 000,00 250 000,00
Diminution des réserves   -70 000,00
Dépenses non admises 85 000,00
Résultat 1ère opération (code 1410 de la déclaration ISoc) 15 000,00

 

Calcul de la DNA[43] (code 1266)

A =      (100.000,00 x 20,40%) + (80.000,00 x 29,58%) = 44.064,00

B =      10.000,00 x 20,40% = 2.040,00

E =      (100.000,00 x 20%) + (70.000,00 x 25%) = 37.500,00

F =      (Résultat fiscal à 15.000,00 mais MIN 170.000,00 – 170.000,00 = 0 x 20% = 0

 

44.064 – 2.040

——————– = 1,12064 x 100 – 100% = 12,06%

37.500 – 0

Montant de la DNA à déclarer : 170.000,00 x 12,06% = 20.502,00

 

Calcul de la cotisation distincte[44]

Base de la cotisation distincte :

Taux de l’ISoc =        25%

Bénéfice =                 – 155.000,00 + 20.502,00 + 170.000,00 = 35.502

Perte =                       170.000,00 + 20.502,00 – 35.502,00 = 155.000,00 x 10% = 15.500,00

 

Base de la cotisation distincte = 25% x (35.502,00 – 15.500,00) = 5.000,50

 Taux de la cotisation distincte :

     35.502,00

———————————————— x 100 x 20% = 4,58%

170.000,00 + 20.502,00 – 35.502,00

Montant de la cotisation distincte :

5.000,50 x 4,58% = 229,03

VIII COMMENTAIRE

Par rapport à la limitation de la réserve exonérée, on peut deviner la volonté du législateur d’empêcher le report des déductions prévues de la 4ème à la 6ème opération à l’ISoc (RDT et RME, déduction pour revenus de brevets et déduction pour revenus d’innovation à l’(aux) exercice(s) suivant(s).

En effet, seules ces déductions constituent également des produits compris dans le résultat fiscal « 1ère opération » à l’ISoc[45]. Il est donc cohérent d’empêcher la déduction d’une perte anticipée à concurrence de ces montants et ainsi empêcher la société de reporter les déductions visées à un exercice d’imposition ultérieur.

En ce qui concerne le calcul éventuel de la dépense non admise[46], le but du cette mesure consiste à sauvegarder les liquidités de l’entreprise en reportant le paiement des impôts grâce à cette déduction anticipée et certainement pas d’offrir une diminution de l’impôt. La majoration de la base imposable par cette DNA consiste donc à neutraliser l’économie potentielle d’impôt dans l’éventualité où le taux d’imposition de l’exercice d’imposition de la constitution de la réserve temporairement exonérée est plus élevé que celui de l’exercice d’imposition de la reprise de cette réserve.

Cependant, pour l’exercice de la constitution de la réserve, lorsque la société pouvait faire valoir des déductions susceptibles d’absorber complètement le résultat subsistant sans déduire anticipativement l’estimation de sa perte, elle n’aurait de toute manière pas payé d’impôts. Dans ce cas, la société n’a réalisé aucune économie d’impôt. Or, eu égard au fait que le premier terme du numérateur doit s’élever au minimum au montant de la réserve exonérée, une DNA imposable doit être calculée et déclarée.

Quant à la cotisation distincte, force est de constater qu’elle atteint effectivement l’objectif du législateur en ce qu’il voulait éviter une surestimation de la réserve exonérée. En effet, dès que l’estimation de la perte fiscale a été trop élevée par rapport à la perte fiscale réelle, la cotisation peut, dans certains cas, atteindre des montants très importants.

Bien qu’une tolérance de 10% ait été prévue, l’analyse de la formule liée au calcul de cette cotisation révèle que la DNA doit y être reprise. On remarque d’ailleurs que dans l’exemple repris en illustration, l’estimation de la perte reste inférieure à 110% de la perte réelle alors qu’une cotisation distincte sera due.

 

Enfin, en ce qui concerne les sociétés exclues de cette disposition, l’article 194septies/1, §3, alinéa 1er CIR précise que l’exonération n’est notamment pas applicable aux sociétés qui ont effectué une attribution ou une distribution de dividendes visés à l’article 18 CIR durant la période du 12/03/2020 jusqu’au jour de l’introduction de la déclaration se rattachant à l’exercice d’imposition 2021.

Dans ce cadre, on peut imaginer une société qui a exonéré pour l’exercice d’imposition 2020 l’estimation de sa perte fiscale se rattachant en principe à l’exercice 2021.

A la clôture de l’exercice comptable 2020, il s’avère que la perte réelle est nettement moins élevée que prévu et, partant, que les conséquences en termes de DNA et de cotisation distincte sont très lourdes à supporter. Si les actionnaires de la société décident de distribuer un dividende à l’occasion de l’assemblée générale qui approuve les comptes de l’exercice comptable 2020, comment l’Administration Générale de la Fiscalité va-t-elle réagir ? En constatant ce cas d’exclusion, l’administration va-t-elle procéder à un enrôlement supplémentaire pour l’exercice d’imposition 2020 en imposant la réserve exonérée et accepter que ni la DNA ni la cotisation distincte de l’exercice d’imposition 2021 ne soient prises en considération ? Ou alors, l’administration va-t-elle faire usage de l’article 344, §1er, CIR et donc se baser sur la théorie de l’abus fiscal ? Le cas échéant, on pourrait en effet considérer qu’en distribuant ces dividendes, la société s’est volontairement placée en dehors du champ d’application d’une disposition légale[47].

IX CONCLUSION

En conclusion, on ne peut que féliciter la volonté du législateur d’avoir voulu préserver voire renforcer les liquidités des sociétés dans le contexte de la pandémie « COVID 19 » et des fermetures obligatoires de certains établissements. Cependant, pour les professionnels de la comptabilité, il convenait d’estimer avec une extrême prudence la perte fiscale de l’exercice suivant sous peine de voir leurs clients sévèrement punis financièrement.

Jean Pierre RIQUET
Juriste fiscaliste

13 X 21

Renvois

[1] Lois du 29/05/2020 (MB 11/06/2020), 23/06/2020 (MB 01/07/2020), 15/07/2020 (MB 23/07/2020), du 19/11/2020 (MB ), du 20/12/2020 (MB 30/12/2020), 02/04/2021 (MB 13/04/2021 et 18/07/2021 (MB 29/07/2021)

[2] Voir site du SPF FINANCES – https://finances.belgium.be/fr/entreprises/coronavirus

[3] « carry back » des pertes

[4] Article 194septies/1 CIR

[5] Article 185, §5 CIR

[6] Article 219ter CIR

[7] Résultat fiscal « 1ère opération » – Code 1410 de la déclaration à l’ISoc

[8] Article 194septies/1, § 1er, alinéa 1er CIR

[9] Art 190 CIR

[10] Article 194septies/1, § 1er, alinéa 2 CIR

[11] Article 194septies/1, § 1er, alinéa 3 CIR

[12] Article 194septies/1, § 2 CIR

[13] Résultat fiscal « 1ère opération » – Code 1410 de la déclaration à l’ISoc

[14] Articles 202 à 205 CIR

[15] Article 205/1 CIR

[16] Article 543 CIR

[17] Article 194septies/1, § 3 CIR

[18] Article 194septies/1, § 5 CIR

[19] Code 1124 de la déclaration à l’ISoc de l’exercice d’imposition 2019

[20] Avis de la Commission des Normes Comptables du 14/05/2020

[21] Article 194septies/1, § 4 CIR

[22] Article 194septies/1, § 5 CIR

[23] Article 463bis CIR

[24] Article 215, alinéa 1er CIR

[25] Article 215, alinéa 2 CIR

[26] Voir également la circulaire administrative n°2018/C/116 du 22/10/2018

[27] Article 185, §5, alinéa 6 CIR

[28] Article 185, §5, alinéa 2 CIR

[29] Article 185, §5, alinéa 3 CIR

[30] Article 185, §5, alinéa 4 CIR

[31] Article 185, §5, alinéa 5 CIR

[32] Article 219ter CIR

[33] Article 219ter, §2 CIR

[34] Résultat « première opération » – code 1410 de la déclaration à l’ISoc

[35] Article 219ter, §2, alinéa 3 CIR

[36] Article 219ter, §2, alinéa 4 CIR

[37] Article 219ter, §3, alinéa 1er CIR

[38] Résultat « première opération » – code 1410 de la déclaration à l’ISoc

[39] Article 219ter, §3, alinéa 3 CIR

[40] Article 219ter, §3, alinéa 4 CIR

[41] Article 198, § 1er, 1° CIR

[42] Article 27 de la Loi du 23/06/2020

[43] Article 185, §5 CIR

[44] Article 219ter CIR

[45] Code 1410 de la déclaration à l’ISoc

[46] Article 185, §5 CIR

[47] Article 344, §1er, alinéa 2, 1° CIR

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