Une association de fait peut elle exercer des activités économiques ?

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Résumé

Une association de fait est une structure intéressante pour mettre en commun l’organisation d’une activité non économique comme une fête de village, de quartier, un groupement d’artistes sans spectacle, un club sportif, etc.  Ces activités ne poursuivent pas de but de lucre ni d’activité économique.

Par contre, croire qu’une association de fait peut être utilisée dans le cadre économique, à but de lucre est sujet à difficultés.

Définition économique

L’association de fait n’est pas une entreprise à but de lucre au sens du Code de droit économique (CDE) car elle ne pas procède à une distribution de bénéfices et doit poursuivre un but exclusivement désinteressé. Elle ne réalise donc pas d’activité économique.

L’article I.1, 1°, CDE, définit comme entreprise chacune des organisations suivantes :

(a) toute personne physique qui exerce une activité professionnelle à titre indépendant;

(b) toute personne morale;

(c) toute autre organisation sans personnalité juridique.

Cependant, ne sont pas des entreprises, sauf s’il en est disposé autrement dans le CDE ou d’autres dispositions légales prévoyant une telle application :

(a) toute organisation sans personnalité juridique qui ne poursuit pas de but de distribution et qui ne procède effectivement pas à une distribution à ses membres ou à des personnes qui exercent une influence décisive sur la politique de l’organisation;

(b) toute personne morale de droit public qui ne propose pas de biens ou services sur un marché;

(c) l’Etat fédéral, les régions, les communautés, les provinces, les zones de secours, les prézones, l’Agglomération bruxelloise, les communes, les zones pluricommunales, les organes territoriaux intracommunaux, la Commission communautaire française, la Commission communautaire flamande, la Commission communautaire commune et les centres publics d’action sociale.

Il est donc clair que l’association de fait est organisation sans personnalité juridique qui ne poursuit pas de but de distribution et qui ne procède effectivement pas à une distribution à ses membres ou à des personnes qui exercent une influence décisive sur la politique de l’organisation. dans le cas contraire, elle ne serait pas une association mais une société (Doc. parl. 54k3119/001, p. 21 et avis du Conseil d’état).

 Que dit le Code des sociétés et associations (CSA) ?

L’association de fait est mentionnée à l’article 1:6, par. 1er, CSA, sans être reconnue par le CSA. Cette association sans personnalité juridique est régie par la convention des parties. Il s’agit donc d’un groupement de personnes purement contractuel.
Reprendre l’association de fait dans le CSA s’explique simplement parce que le CSA n’a nullement pour but d’empêcher des lois extérieures de créer d’autres formes d’associations et d’établir des règles qui dérogent au CSA. Le législateur n’entendaient pas non plus supprimer les formes d’association de fait existant avant l’entrée en vigueur du CSA.
Par contre, tant le CDE (entré en vigueur le 1er mai 2018) que le CSA (entré en vigueur le 1er mai 2019) ne reconnaissent l’ADF comme entreprise permettant des activités économiques.

Le but désintéressé

Une association est un contrat entre deux ou plusieurs personnes, au contraire d’une société qui est un acte juridique et pas un contrat.

Une association doit être constituée d’au minimum deux personnes juridiquement distinctes et elle peut être ou non dotée de la personnalité juridique. Il n’est pas obligatoire, contrairement aux sociétés, que l’association possède un patrimoine ni la mise en commun de moyens.

L’association de fait (ADF) est une structure sans personnalité juridique, à but exclusivement désintéressé, qui ne permet pas le dégagement ou l’attribution de bénéfices.

L’intérêt personnel des membres de l’association n’existe pas pour rencontrer ce but désintéressé. L’association réalise un objectif gratuit, auparavant dénommé sans but de lucre, et les membres ne tirent aucun avantage personnel des activités de l’association.

Dès qu’il existe ou est constaté une distribution quelconque, directe ou indirecte, des résultats ou du patrimoine de l’association, le but désintéressé n’est plus satisfait et l’association devient une société.

Cette interdiction est d’ordre public en tant que spécialité légale des associations. Le pouvoir de l’organe d’administration est donc limité par ce cadre juridique et opérationnel et reprise à l’article 1 :4, CSA.

Cependant, rien n’interdit une association de rendre gratuitement des services à ses membres tant que ceux-ci s’inscrivent dans son objet. De même, les travailleurs et membres de direction, d’administration, peuvent être rémunérés de manière non excessives pour leurs prestations.

Le législateur donne comme exemple une association sportive qui peut autoriser ses membres à utiliser gratuitement les installations ou à un prix inférieur au marché, accorder des accès gratuits à des évènements, dispenser gratuitement des soins, etc. tant que ces libéralités s’inscrivent dans une réalisation normale du but de l’association (Doc. Parl. 54k3119/001, p. 28).

 Utilité de l’ADF

Il faut considérer l’ADF comme une structure de partage de frais entre les membres : une grande feuille de calcul où chacun des membres paie, selon la convention conclue, une partie des dépenses réalisées par l’ADF non couverte par les rentrées des activités.

Il n’est plus interdit comme auparavant aux associations avec personnalité juridique de poursuivre des activités anciennement appelées commerciales ou industrielles. Les associations et les sociétés peuvent exercer toutes les activités économiques (sauf celles spécifiques comme banque ou assurances, …), la distinction est l’exploitation dans un but désintéressé pour les associations avec personnalité juridique.

 L’ADF est parfois immatriculée à la TVA et à l’ONSS

Le fait que l’ADF obtienne un numéro d’entreprise à la BCE ne lui octroie qu’une identification administrative afin de réaliser les obligations sociales (ONSS) et fiscale (TVA).  L’ADF, au contraire de la société simple, n’est pas reconnue par le CSA si elle devient administrativement immatriculée à la BCE, elle n’en demeure pas moins une indivision entre ses membres dont la responsabilité solidaire et indivisible est de droit.

Les documents d’immatriculation à la TVA et à l’ONSS en témoignent que tous les membres doivent être identifiés individuellement et sont responsables sur leur patrimoine privé.

 Comment exercer une activité économique avec une structure sans personnalité juridique ?

Par contre, pour l’exercice d’activités économiques à but de lucre, la seule structure sans personnalité juridique qui est une entreprise est la société simple et elle peut être immatriculée à la BCE. Elle est régie par le Livre 4 du CSA.

La société simple peut bénéficier des mesures du livre XX CDE, contrairement à l’ADF qui n’est pas une entreprise en tant que telle.

 Conclusion

Exercer une activité économique via une association de fait est dangereux car elle ne répond pas au prescrit légal.

En plus, si l’ADF réalise des « bénéfices », ceux-ci ne peuvent pas être distribués de manière directe ou indirecte.

Le mieux, pour l’exercice d’une activité économique à but lucratif, est de constituer une société simple (sans responsabilité juridique avec responsabilité solidaire des membres) ou une société en commandite (SComm) ou en nom collectif (SNC) avec responsabilité juridique mais aussi avec responsabilité solidaire des associés (sauf le vrai commanditaire non actif).

Jean Pierre RIQUET

Juriste fiscaliste
Professeur associé Ephec

09 VIII 23

Disclaimer  Le présent article n’est pas un avis ou une consultation mais une simple information. L’auteur et la rédaction veillent à la qualité et la fiabilité des informations lesquelles ne sauraient toutefois engager leurs responsabilités.

 

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